L'existence de la cellule Alliance Base confirméeFranck Cognard du service police justice répond à nos questions sur l'enquête concernant la cellule Alliance Base.
Comment a démarré votre enquête ?
Franck Cognard : En juillet 2005, le Washington Post sort un papier d’une journaliste spécialiste des questions de renseignements et qui affirme pour la première fois dans l’histoire du renseignement, l’existence d’une cellule antiterroriste commune financée par la CIA. Elle comprend des officiers de la CIA, du FBI et d’autres des services secrets. En tout 6 pays avec des Canadiens, des Britanniques, des Australiens, des Allemands et des Français sont réunis au sein de cette cellule sous commandement français et dont le but est de traquer les terroristes d’Al Qaïda. A l’époque, nous n’avons pas de confirmation officielle ou de documents écrits.
Et aujourd’hui avez-vous eu des confirmations ?
F.C. : Aujourd’hui, nous avons pu consulter des documents officiels du ministère de la Défense qui montrent qu’en avril 2002 alors qu’Alain Richard est ministre de la Défense le projet est en cours. Ces notes, qui baptisent le projet "Alliance", expliquent l’intérêt d’avoir une telle cellule sur le sol français et aussi les réticences de certains services comme la DGSE.
D’autres documents nous montrent qu’en novembre 2003 un premier bilan de 6 mois de fonctionnement de cette cellule est dressé.
Le fonctionnement dans l’échange de renseignements est excellent et qu’il faudrait
développer l’opérationnel c'est-à-dire la neutralisation de certains objectifs. Ces documents écrits prouvent que cette cellule existe bel et bien.
Malgré la menace d’Al Qaïda sur l’Europe, on peut parler de cette cellule aujourd’hui ?
F.C. : Nous n’avons pas de confirmation du nombre d’opérations réalisées par cette cellule, ni des objectifs réalisés. Selon le Post, mais cela n’a jamais été ni démenti, ni confirmé, cette cellule aurait permis l’arrestation d’un Allemand, Kristian Ganczarski, présenté comme l’un des hauts représentants d’Al Qaïda en Europe. Depuis il n’y a jamais eu et il n’y aura sans doute jamais de confirmation de tout ça. Mais selon l’un des experts que nous avons rencontré, le renseignement aujourd’hui est aussi une affaire de communication pour des Etats et c’est une manière de dire que nous travaillons en commun et nous sommes tous copains. L’une des personnes que nous avons également rencontré, explique que l’article du Post correspondait à une période où la France et les Etats-Unis menaient une sorte de front commun pour ramener la Syrie dans le droit chemin politique. C’est sans doute pour une raison d’affichage politique que cette information est sortie. Pour montrer qu’il n’y a pas forcément que des tensions entre la France et les Etats-Unis depuis le début de la guerre en Irak. On sait bien que lorsque les grands décideurs sont fâchés, c’est là que des contacts se nouent notamment dans les services de renseignements.